Les sorcières envahissent Pont-Aven

Pont-Aven : une exposition révélatrice sur la figure de la sorcière

Les sorcières envahissent pont-aven

  • La sorcière devient une figure moderne au XIXe siècle, symbole de résistance et de savoir.
  • L'exposition montre que la stigmatisation sociale des sorcières dépasse la religion, touchant la sexualité et la médecine.
  • Les représentations artistiques renforcent les clichés, mais certains documents évoquent aussi l'aspect mythologique breton.
  • L’exposition invite à repenser cette figure dans un contexte contemporain sur le pouvoir et le genre.

Le Musée de Pont-Aven accueille l’exposition « Sorcières (1860-1920) : fantasmes, savoirs, liberté », réalisée en partenariat avec le Musée d’Orsay. Cette exposition explore l’évolution de la représentation des sorcières au XIXe siècle et les enjeux sociaux, politiques et esthétiques qui y sont liés.

Des héroïnes populaires

Au lieu d’être une simple survivance médiévale, la sorcière devient, au XIXᵉ siècle, une icône moderne. Jules Michelet réinvente cette figure en « héroïne populaire et dépositaire d’un savoir paysan mal compris » dans son essai publié en 1862. Les artistes s’engagent alors à transformer la sorcière en muse fascinante ou en symbole de résistance. Le parcours de l’exposition se divise en trois grandes thématiques :

  • La nuit, mettant en avant les images épouvantables liées aux rituels.
  • Le corps, traitant des mutilations et du rapport à la séduction.
  • Le savoir, explorant le rôle des herboristes et guérisseuses tout en dénonçant comment ces figures ont été socialement stigmatisées.

La scénographie démontre que l’accusation de sorcellerie dépassait le cadre religieux pour engendrer un discours social lié à la sexualité et à la médecine naissante.

Sur les murs du musée, différentes œuvres illustrent cette complexité. Par exemple, la toile symboliste « Légende bretonne » (1906) d’Edgard Maxence présente une sorcière mystérieuse abordant une jeune fille habitée par un sentiment à mi-chemin entre fascination et peur envers le féminin atypique.

Une critique sociale profonde

L’exposition révèle également que beaucoup de femmes désignées comme sorcières étaient en réalité des guérisseuses menacées par l’avènement d’une médecine centralisée. Les œuvres médicales présentées traduisent souvent une obsession pour les corps jugés déviants, vieillesse ou folie, transformant ainsi ces femmes en sujets d’études cliniques plutôt qu’en actrices autonomes.

Simultanément, elle montre que l’image de la sorcière a servi à contrôler ceux dont les comportements dérangeaient. Nonobstant ce regard critique sur le passé, des récits alternatifs redonnent voix aux femmes animées par des pratiques ancestrales réprimées.

De plus, elle met en lumière comment les arts graphiques du XIXᵉ siècle ont façonné l’imaginaire collectif autour du personnage fantastique de la sorcière grâce à diverses représentations médiatiques, caricatures et affiches illustratives qui véhiculèrent maints clichés persistants.

Mythologie bretonne enrichissante

Un autre segment souligne que les régions comme celle du Finistère ont alimenté divers mythes liés aux créatures mystiques telles que korrigans et fées. Plusieurs peintres ont cherché inspirer leurs créations par l’étude locale tout en érotisant ces figures sous prétexte de célébration culturelle.

Documents d’archives et extraits littéraires complètent ce parcours historique enrichissant : ils montrent bien que jusqu’à nos jours demeurent visibles les mécanismes exclusionnistes tels que stigmatisation ou juridiction qui frappèrent tant ces femmes accusées seulement sur base présumée d’infractions imaginaires.

Les commissaires Leïla Jarbouai (Musée d’Orsay) et Emma Dechorgnat présentent un récit mêlant rigueur scientifique avec sensibilité artistique sans jamais tomber dans le sensationnel. La sortie apporte une nouvelle compréhension contemporaines autour du pouvoir, genre ou encore savoir dissociés des siècles précédents.

Finalement débarrassée des clichés conventionnels associés autour d’elle-même, cette figure plurielle pose question face aux modalités actuelles traitant encore aujourd’hui certaines voix perçues comme dérangeantes.

Journaliste spécialisé dans l’actualité, je combine dix ans d’expérience en rédaction avec une curiosité constante pour la société et l’innovation. Marié et passionné de randonnée, j’aime partager une information claire, fiable et accessible à tous.